Jeunesses françaises

Grands ensemble

Avec Gérôme Truc

La Découverte, 2025

Un livre de plus sur la banlieue ? Pour dénoncer son  » communautarisme  » et son  » séparatisme  » ? Pour célébrer sa  » diversité  » et son  » dynamisme  » ? Non. À rebours des clichés, une enquête patiente menée pendant dix ans par Fabien Truong et Gérôme Truc dans la foulée des attentats de 2015, à Grigny, ville  » la plus pauvre de France  » – qui est aussi celle du  » terroriste de l’Hyper Cacher « .

Au plus près des personnes et des faits, Grands ensemble éclaire d’un nouveau jour le rapport des quartiers populaires aux attentats islamistes et, de là, la vie ordinaire de leurs habitantes et habitants, à l’épreuve des violences qui pèsent structurellement sur leur quotidien : celles des trafics et de la police, mais aussi de l’exploitation, de la pauvreté, du racisme, du virilisme et de la stigmatisation. À l’épreuve aussi des blessures intimes et des combats communs.
Comment tient-on dans ces conditions ? Qu’induit le fait de vivre en se sachant scruté par les médias, pointé du doigt quand un voisin bascule dans le terrorisme ? Pourquoi les conditions de vie dans ces quartiers ne cessent-elles de se dégrader, alors qu’une large part de leur population parvient à trouver sa place dans la société ?
Les réponses apportées ici épousent le rythme et les contours de multiples trajectoires entrecroisées. Des vies qui rappellent que la pauvreté et la marginalisation engendrent solidarités mais aussi rivalités, pavant la voie à un rapport au monde où le ressentiment coexiste avec l’espoir et la joie.

Loyautes Radicales

Loyautés radicales

La Découverte, 2017/ Poche, 2025 (édition augmentée/ postface inédite)

À la suite des attentats frappant notre pays à répétition, les mots se figent – entre « islamisation » et « radicalisation » – pour désigner un phénomène perçu comme une menace : le désir d’islam des « mauvais garçons » de la Nation. Immigrés de descendance, passés par la délinquance, musulmans par croyance : tel serait le portrait robot du nouvel extrémisme made in France.

Dans cette enquête dense et sensible, nous embarquons avec Adama, Radouane, Hassan, Tarik, Marley et un fantôme dont le nom s’est brutalement imposé au monde : Amédy Coulibaly. Pour espérer comprendre la terreur, Fabien Truong fait le pari de revenir sur Amédy et sa « vie d’avant », en gagnant la confiance des vivants.
Aux bords de la ville, ces garçons apprennent à devenir des hommes en éprouvant des loyautés concurrentes. Envers leur quartier, leurs copains et les non-dits de l’histoire familiale. Mais aussi envers la Nation et son idéal méritocratique, et envers un capitalisme promouvant l’individualisme, la virilité et la compétition économique. Les contradictions affleurent, surtout quand l’économie souterraine, la police et l’absurdité du matérialisme ordinaire sont de la partie. La religion musulmane se dresse comme une dernière ressource pour s’en sortir sans trahir et combattre avec noblesse. S’engage une lente reconversion, autorisant l’introspection et le changement de direction. Mais aussi, parfois, une mise en scène spectaculaire qui transforme l’impasse en un cri de guerre.
En nous rappelant qu’apprendre à les connaître « eux », c’est finalement mieux « nous » comprendre, Loyautés radicales jette une lumière inédite sur le quotidien de ces jeunes hommes et sur les nouvelles formes de violence qui nous entourent collectivement, dans un monde où on ne naît pas guerrier, mais où on le devient.
Jeunesses françaises

Jeunesses françaises

La Découverte, 2015 / Poche, 2022 (postface inédite)

Ancien prof de lycée dans le « 9-3 » devenu sociologue, Fabien Truong apendant dix ans – des émeutes de 2005 aux attentats de janvier 2015 –suivi et accompagné une vingtaine d’anciens élèves, du bac jusqu’à la fin de leurs études. Tour à tour prof, enquêteur, témoin, conseiller et confi dent, il dresse ici le portrait tout en finesse d’une certaine jeunesse française, celle des banlieues populaires issues de l’immigration.

Loin des clichés médiatiques, du fatalisme politique ambiant et des prophéties catastrophistes de la « désintégration sociale », ce livre observe la dilution quotidienne de cette jeunesse dans la société française. De la fac aux grandes écoles, en passant par les cycles plus courts, ces jeunes incarnent la face cachée d’une passion nationale : sortir de sa condition par l’école. Confrontés au stigmate des origines, à l’impératif de rentabilité assigné aux études longues et à la précarité massive, ils mènent un combat ordinaire pour gagner l’estime de soi et apprendre à naviguer entre les multiples frontières du monde social.

En offrant une véritable plongée dans l’intimité de ces jeunes étudiants en quête d’échappée, ce livre peut se lire aussi comme un récit initiatique, déroulant dans le temps long leurs rêves d’ascension sociale, leurs questionnements identitaires, les peines et les joies de l’apprentissage intellectuel, leur rapport à la religion ou leurs histoires d’amour. Car, dans ces territoires de la République, rien n’est jamais gagné ni perdu d’avance.

Des capuches et des hommes

Des capuches et des hommes

Buchet-Chastel, 2013

[Prix de l’Ecrit Social 2014]

À travers des entretiens avec trois « jeunes de banlieue », Radouane, Tarik et Eliott, Fabien Truong esquisse le portrait d’une jeunesse aux trajectoires ambivalentes. Le rapport aux pères, la vie dans le quartier, les études, les tentations du vol ou du deal, la relation aux filles, les rêves de famille et de pavillon loin des barres d’immeubles, la religion – improbable alliée de la République – vers laquelle on se tourne quand on sort de la délinquance, sont autant de nœuds dont les entrelacements déterminent ce que devenir un homme dans la banlieue française veut dire.

Alors que les émeutes et les faits divers embrasant les quartiers de relégation urbaine contribuent à confiner ces espaces dans la périphérie physique et mentale des villes, les polémiques qui s’ensuivent ne font que masquer la pauvreté du discours sur le problème de la délinquance juvénile, car, si l’on excepte les postures du mépris et du déni qui consistent à dire que ces jeunes sont soit partout soit nulle part, que reste-t-il dans le débat public ?

Une enquête ethnographique, écrite à rebours d’une pensée ambiante qui ne se conjugue qu’au présent, d’une société qui interdit toute prise de parole effective de ces garçons encapuchés, et du fatalisme et du pessimisme de rigueur.

RADICALIZED LOYALTIES

Radicalized Loyalties

Polity Press, 2018

Times Higher Education:

‘An excellent ethnography of Muslim masculinity’

Los Angeles Review of Books:

‘A thoughtful, well-crafted ethnography that humanizes the faceless, amorphous “Muslim youth” of the French banlieues’

Loïc Wacquant (University of California, Berkeley):

‘Fabien Truong take us deep inside the personal world of  six immigrant young men from France’s disreputable urban periphery. He shows how they navigate the promises and demands of the school, the street economy, the prison, and the police, and why they are attracted (or not) by Islam as a ‘floating political imaginary.’ An insightful and urgent contribution to the analysis of the social fabrication of terrorists that punctures the sonorous but empty notion of « radicalization ».’

Scott Atran (CNRS, Paris, and University of Oxford):

‘It is not a clash of civilizations that Fabien Truong vividly describes but a collapse of communities, as young men in transitional stages of their life search for significance in the West’s Muslim diaspora. If you want to understand how most overcome feelings of rootlessness and despair and how a few become jihadis, read this book.’

David Lehmann (University of Cambridge):

‘Truong vividly describes the lives of young men from immigrant backgrounds in the Paris banlieue, charting their trajectories from dropping out of school towards crime and then prison. This is an extremely valuable book, rich in ethnographic detail and very well written: I was irresistibly drawn in to this world of kickbacks, payoffs and unsettlingly deep resentment against the whole of French society.’

Becoming Muslim does not necessarily lead to the radicalized other . It is more like a long–distance race, a powerful reconversion of the self that allows for introspection and change. But it can also lead to a belligerent presentation of the self that transforms a dead–end into a call to arms.